vendredi 30 mars 2012

La technologie qui pourrait ramener la production des Nike aux USA


Flyknit : une seule pièce tissée en remplace 36
« C’est une révolution qui pourrait permettre de fabriquer les chaussures Nike n’importe où dans le monde » dit, dans Business Week (du 19-25 mars), le responsable de la marque, Charlie Denson. N’importe où, donc aux US notamment.

Une révolution en effet pour ce grand adepte de la délocalisation qui fabrique systématiquement ses chaussures dans les pays d’Asie au plus bas coût de main d’œuvre : 96% d’entre elles sont produites au Vietnam, en Chine ou en Indonésie.

L’innovation qui rend cette perspective imaginable est mise en œuvre sur la nouvelle chaussure du fabricant américain qui sortira en juillet prochain : la Flyknit. Son nom donne une indication de la technologie utilisée. Knit signifie « tissé » et c’est justement là tout le secret. Nike a mis au point une complexe machine de tissage pilotée par ordinateur qui permet de tisser toute la partie supérieure de la chaussure. Comme une chaussette !

Le résultat : la partie supérieure de la Flyknit est réalisée avec deux pièces seulement, au lieu de 37 ! Autrement dit, la partie qui réclame le plus de main d’œuvre – il faut  en effet couper puis assembler toutes ces pièces  - est réalisée automatiquement. D’où l'idée de penser à la possibilité de rapatrier la fabrication.

Le processus sophistiqué mis au point par Nike offre d’autres atouts :  il permet de fabriquer des chaussures ultra légères (la Flyknit ne pèse que 150 grammes) et, mieux encore, ouvre la possibilité de réaliser des chaussures réellement sur mesures.

Deux leçons à tirer de cette innovation :
- Les process de production jouent un rôle majeur dans la compétitivité de l’industrie et cela apporte de l’eau au moulin de ceux qui veulent les booster (voir le post d’hier). On reviendra là-dessus lundi.
- C’est utile d’avoir un patron «  ingénieur » ou du moins qui connaît parfaitement son produit. Si l’on en croit l'article de Business Week, c’est en visitant le centre de recherche de Nike que son CEO Mark Parker a eu l’œil attiré par une recherche en cours sur cette machine, a jugé de son potentiel et l’a lancée. Il connait la musique. C’est lui qui, comme designer, avait déposé un brevet sur la Nike Air.

jeudi 29 mars 2012

Obama : un programme d' 1 milliard de dollars pour l'innovation dans le manufacturing en 2013

J’avoue que j’avais raté cette info qui date du 9 mars dernier. Mais, sachant que mieux vaut tard que jamais, la voici : Barack Obama a proposé de construire un réseau national de 15 instituts voués à l’innovation  dans les technologies de production : le National Network for Manufacturing Innovation (NNMI).  L’investissement, sur le budget de 2013, serait de 1 milliard de dollars.

Le président a également annoncé que son administration allait lancer immédiatement un institut pilote pour la “manufacturing innovation” . Un investissement de 45 millions de dollars issus des  Départements de la Défense, de l’Energie, du Commerce and de la National Science Foundation.

Le NNMI sera financé par des investissements venus de l’industrie de l’état, des instances locales et des organismes de recherche. L’initiative est menée en commun par  National Institute of Standards and Technology (NIST), la National Science Foundation, le Département de la défense et le Département de l’énergie

Cette initiative fait suite à la création fin 2011 de l’ Advanced Manufacturing National Program Office qui réunit plusieurs agences gouvernementales pour définir et monter des programmes publics privés sur l’innovation en production.

A Lire
Le plan national sur le manufacturing de février dernier :  A National Strategic Plan for Advanced Manufacturing 
Le communiqué du NIST annonçant le NNMI
Voir aussi le post « Les US doivent consacrer un milliard de dollars par an à la R&D sur le manufacturing »

mercredi 28 mars 2012

Les PME du numérique veulent du CIR pour grossir


Pas moins de sept pôles sont signataires
du Manifeste
Dans la série des doléances pré électorales, une kyrielle de pôles de compétitivité et de syndicats professionnels (liste ci-dessous) vient de lancer le « Manifeste des 5000 PME innovantes de la filière TIC ».

Que veulent-elles ces PME ?  En premier lieu, davantage de crédit d’impôt recherche (CIR) car « Le CIR est le moteur de toutes les entreprises innovantes du secteur des technologies de l’information caractérisé par des PME et des grands groupes qui forment un écosystème dans lequel se crée l'innovation. »

De fait elles réclament surtout un CIR mieux adapté à leur activité avec « la prise en compte des évolutions du numérique dans l’instruction fiscale, en particulier la définition de l’activité logicielle. »  

Une autre revendication laisse supposer que la prise en compte des spécificités de cette industrie semble  laisser à désirer. On peut en effet lire dans ce manifeste une demande pour le moins étonnante :  «  Le contrôle de l’éligibilité des projets de R&D en matière de TIC doit être effectué par des agents du MESR [ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche] compétents et diplômés en la matière. Un échange contradictoire avec ces agents doit  être possible afin de préserver le principe du contradictoire. » C’est tout un programme !

A côté d’autres propositions sur le CIR, le Manifeste milite également pour la conservation et l’extension du statut de la Jeune entreprise innovante (JEI), le renforcement des dispositifs fiscaux d'incitation à l'investissement dans les PME  et la création du fameux Small Business Act : « Un engagement clair et définitif du gouvernement français à mettre en place un SBA à la Française en cohérence avec les développements européens, avec un objectif  de 25% des achats publics en volume accordé aux PME et ETI . »

Lire le Manifeste des 5000 PME innovantes de la filière TIC

Les auteurs du Manifeste
Le Manifeste est porté par les pôles de compétitivité Systematic Paris-Region, Cap Digital, Images & Réseaux, Minalogic, Solutions Communicantes Sécurisées.
S’y ajoutent Syntec Numérique, le Comité Richelieu, PME Finance, CGPME Paris Ile de France avec la FIEEC, l’AFDEL, SYNNOV, le RETIS
Y ont également participé, les pôles de compétitivité Alsace Biovalley et Medicen

mardi 27 mars 2012

« Reverse innovation » : pire encore que les délocalisations !

Vijay Govindarajan : "il vaut mieux se cannibaliser
 soi-même... "
Reverse Innovation ? L’idée est explosive ! Et toute simple. Elle consiste à dire que désormais, l’avenir est aux innovations conçues et réalisées dans les pays émergents pour les pays émergents, par les entreprises occidentales en particulier. Des innovations « frugales » faites pour satisfaire les consommateurs (pauvres) de ces pays.

Ce n'est pas tout. Où cette idée devient vraiment intéressante (et effrayante) est lorsque son inventeur et promoteur affirme que ces innovations hyper low cost ont aujourd'hui vocation à diffuser ensuite vers les pays occidentaux. L’exact opposé de ce qui se passait il y a quelques décennies. D’où le le nom… Les conséquences sur la réindustrialisation et l'emploi sont potentiellement terribles.

On doit ce concept à Vijay Govindarajan professeur au Dartmouth College (New Hampshire). Apparue pour la première fois dans un article cosigné avec le pdg de General Electric dans Harvard Business Review, cette analyse vaut à Vijay Govindarajan d’être classé en 5è position dans le Thinker 50, le hit parade des 50 penseurs les plus influents dans le monde des affaires. Reverse Innovation est aujourd’hui le titre du livre qu’il publie avec Chris Trimble.

La logique est implacable : on peut, dans les pays émergents, produire des innovations qui offrent 80% des fonctionnalités d’un produit occidental à 20% du prix, satisfaire un immense marché puis inonder ensuite l’occident avec de tels produits, éventuellement adaptés aux spécificités du marché.

Les exemples ne sont pas encore légion. Mais General Electric, adepte de première heure du processus, l’a déjà mis en oeuvre avec un échographe portable à très faible coût. Développé initialement en Chine pour les médecins chinois, il est désormais commercialisé à un prix défiant toute concurrence aux US.

Vijay Govindarajan cite d’autres exemples dans son livre mais on a en France le modèle parfait et tout à fait pionnier d'une telle innovation : la Logan de Renault Dacia (qui toutefois a été conçue en France). Faite pour les pays émergents, elle séduit aussi le public français. Et elle correspond parfaitement à la logique exprimée par l’auteur du livre  à savoir : « il vaut mieux pour les entreprises occidentales jouer le jeu de la Reverse Innovation au risque de s'auto cannibaliser plutôt que de laisser les innovateurs locaux le faire. »

L’aspect positif de l'affaire pour les entreprises occidentales, son côté vraiment séduisant, tient évidemment au fait que  la reverse innovation leur ouvre de nouveaux et vastes marchés. Mais cela ne va pas sans  la crainte que ces innovations low cost ne finissent par prendre la place des produits high tech et high cost  que l’on s’efforce de développer dans les pays occidentaux, justement afin de reprendre l'avantage sur les émergents.

Cela dit, on peut constater avec un certain soulagement que la Logan qui connaît un succès certain en Europe n’a toutefois pas détrôné les berlines traditionnelles de Renault, pas plus que l’échographe low cost de GE ne l'empêche de vendre ses produits haut de gamme.

 Mais que la cannibalisation soit partielle ou totale ne change rien au fond du problème  : dans tous les cas la production de cette innovation low cost est intégralement réalisée dans les pays low cost comme le prouve parfaitement l'exemple de la Logan  (voir le post d’hier où Patrick Pélata s' explique sur Dacia). Côté industrie et emploi, donc, la perte est totale et irrémédiable. Un sacré mauvais coup pour la « réindustrialisation ». D'autant que, pire que la délocalisation des usines, la reverse innovation porte aussi en germe celle de la conception...

lundi 26 mars 2012

Patrick Pélata (Renault) : « Dacia c'est 500 M€ pour la France »


Sans la production dans la pays low cost,
pas de Dacia...
L’ex n°2 de Renault Nissan, devenu conseiller de Carlos Ghosn, ne cède pas un pouce de terrain quand il s’agit de défendre la stratégie du groupe qui produit ses voitures low cost – Dacia – dans des pays low cost eux aussi : Roumanie, Turquie... et depuis peu Maroc.

Pour se dédouaner complètement des critiques qui n’apprécient guère ce type de délocalisation, Patrick Pélata a même sorti sa calculette. Il dit : « J’ai fait le compte. Si l’on ajoute les importations de 110 000 Dacia et Sandero en France, que l’on ajoute les exportations de pièces, les dépenses de R&D etc., c’est au total 500 millions d’euros que ces véhicules ont rapporté à la France en 2010. » 

Au-delà de ce chiffre, son argumentation, qu’il a exposée lundi dernier aux Entretiens de La Fabrique de l’Industrie, est simple : « si ne nous produisions pas les Dacia dans ces pays elle n’existeraient tout simplement pas. » Et il fait valoir, à juste titre, qu’avec ces voitures low cost pour lesquelles il existe un réel marché international, Renault a coupé l’herbe sous le pied des producteurs des pays émergents, l’Inde en particulier. L’indien Tata aurait logiquement du être le premier à produire de tels véhicules. Il  n’est que le second à s’être engagé dans cette voie avec la Nano qui est loin d’avoir connu le succès espéré.

Autre point soulevé par Patrick Pélata, lors de cette soirée, la production de véhicules haut de gamme. Il reconnait que Renault a raté le coche et lance un sybillin : « Le haut de gamme n’est pas la solution pour tous les constructeurs. » 

Il précise en revanche que si l’on considère que « haut de gamme » est synonyme de « différentiation technologique », Renault est en revanche bien positionné, notamment avec les véhicule électriques et son savoir-faire dans le « véhicule compact à la française ». Il y ajoute les moteurs « haut de gamme » vendus notamment à Infinity (Nissan) et Daimler.

Doit-on en conclure pour autant que pour la marque Renault, la conquête du haut de gamme traditionnel est de l’histoire ancienne ? Pas sûr. La rumeur veut que le constructeur français étudie le lancement d'une berline haut de gamme sur la base d'une plate-forme de son partenaire allemand. A suivre…

vendredi 23 mars 2012

Un concentré de politique industrielle en dix points avec... un grain de sel


Denis Ranque, président du Cercle de
l'industrie : "la compétitivité, priorité absolue"
Franchement, ils ont bien travaillé. 25 patrons de quelques unes des plus importantes entreprises françaises réunis au sein du Cercle de l’industrie, lancent à leur tour dix propositions pour la relance de la compétitivité industrielle. Ces dix propositions sous forme de lettre ouverte aux candidats, synthétisent très bien la plupart des réflexions sur le sujet et méritent qu’on les examine avec attention.

Je me permettrai toutefois d'ajouter mon grain de sel à ce concentré de politique industrielle. La plupart des propositions concerne pleinement les instances gouvernementales à qui elles s’adressent. Bien. On ne s’empêchera toutefois pas de penser que plusieurs d’entre elles sont principalement du ressort des entreprises elles-mêmes. Ce qui laisse espérer que les 25 patrons et leurs collègues n’oublieront pas des les lire et les relire attentivement afin de ne pas oublier de les mettre en œuvre.

Regardez celle-ci par exemple, la n°5 : Mettre en place des filières industrielles intégrées intégrant les Grands Groupes, PME et ETI. Certes, « les candidats doivent veiller à promouvoir une plus grande coopération entre grandes entreprises, PME et ETI, dans le cadre de ces filières » . Mais la balle est tout de même d’abord dans le camp des grands donneurs d’ordres, non ? Les signataires en sont d’ailleurs conscients : «  pour notre part, nous nous engageons à soutenir ces efforts » écrivent-ils.

Celle-là également, la n°7 : Miser sur l’intelligence des acteurs sociaux davantage que sur la médiation de l’Etat. Pas besoin de commentaires.

Il en va de même pour la proposition n°2 : Poursuivre le développement des dispositifs de soutien à l’innovation. Il y est notamment question du crédit d'impôt recherche. Le Cercle de l’industrie écrit : « Pour les PME, bénéficier du CIR, c’est faire plus de recherche ; pour les grandes entreprises, c’est le faire préférentiellement en France, et nous nous y engageons. » C’est la moindre des choses. Et rien ne leur interdit non plus de faire aussi davantage de recherche ! (A ce propos lire le post d'avant hier :  Les labos de R&D sont-ils à roulettes ? )

Voici les dix propositions du Cercle de l’industrie

1. Faire de la croissance fondée sur la compétitivité la priorité absolue. S’assurer que les politiques et mesures du programme présidentiel, puis leur mise en œuvre, favorisent la croissance et la compétitivité.
2. Poursuivre le développement des dispositifs de soutien à l’innovation
3. Orienter la formation vers les  entreprises, et notamment celles du futur
4. Poursuivre la transformation de l’Enseignement Supérieur, notamment par une plus grande synergie entre Grandes Écoles, Universités, Recherche Publique  et Entreprises
5. Mettre en place des filières industrielles intégrées intégrant les Grands Groupes, PME et ETI
6. Faire de nos politiques énergétiques et environnementales des atouts de notre compétitivité de long terme
7. Miser sur l’intelligence des acteurs sociaux davantage que sur la médiation de l’Etat
8. Revoir le mode de financement de la protection sociale afin de moins pénaliser le travail et fairede la politique d'allègement de charges un outil au service de la compétitivité de l'économie
9. Définir un cadre fiscal stable et de long-terme pour favoriser l’investissement
10. A l’échelle européenne, soutenir le développement d’une stratégie industrielle commune

Lire le détail des dix propositions : Les conditions de la relance de la compétitivité industrielle.


La listes des signataires

Denis Ranque, Cercle de l’Industrie, Technicolor ;
Jean-Cyril Spinetta, Air France KLM ;
Benoît Potier, Air Liquide ;  Ben Verwaayen, Alcatel-Lucent ;
 Patrick Kron, Alstom ;  Luc Oursel, Areva ;  Thierry Le Hénaff, Arkema ;
Robert Brunck, CGG Veritas ; Pierre Vareille,Constellium,  
Louis Gallois, EADS ;  Patrick Buffet, Eramet ;
Stéphane Richard, France Telecom ;  Gérard Mestrallet, GDF Suez ;
Bruno Lafont, Lafarge ;  Gilles Schnepp, Legrand ;
Michel Rollier, Michelin ; Philippe Varin, PSA Peugeot Citroën ; 
Maurice Lévy, Publicis ; JeanPierre Clamadieu, Solvay Rhodia ;
Jean-Paul Herteman, Safran ; Pierre-André de Chalendar, Saint-Gobain ;
Serge Weinberg, Sanofi ;  Didier Lombard, STMicroelectronics,
Christophe de Margerie, Total ;  Philippe Crouzet, Vallourec.

jeudi 22 mars 2012

Présidentielles : le numérique pointe son nez

L'une des technologies clés à
ne pas négliger
Une chose est sûre. Les candidats à la présidence ne manqueront pas de lecture. Après les  propositions des uns, les recommandations des autres, les pactes et autres mesures clés, voici le SFIB, alias Syndicat de l’industrie des technologies de l’information, qui s’y met.

Il édite un copieux (30 pages) « Livre blanc sur le numérique » à l’attention des dits candidats. Cela une petite semaine avant un grand raout organisé par Cap Digital pour promouvoir, lui aussi,  le numérique dans la réindustrialisation. Abondance de biens ne nuit pas, dit-on…

Trêve d’ironie. Il ne manque pas de recommandations dans ce livre blanc (il y en même peut être un peu  trop…). Mais, il a un grand mérite. Celui de rappeler que les technologies de l’informatique évoluent très vite et que ce faisant elles offrent souvent l’occasion de profiter des ruptures que crée cette révolution permanente.

Parmi bien d'autres, le SFIB en souligne en particulier trois qui ont un impact majeur, où la France est  plutôt bien positionnée et que, à mon avis, il serait vraiment coupable de négliger. Ce sont :
- Le cloud computing
- Le calcul intensif
- La simulation numérique 

A ce propos le syndicat recommande :
- De renforcer et diversifier le rôle de la France dans le calcul scientifique
- D’augmenter les investissements à hauteur de ce que recommande la Commission européenne
- De faire du cloud computing et du calcul intensif deux « technologies de base prioritaires du numérique » et un domaine d’investissement majeur de l‟Etat
- D’investir dans le développement et la promotion d‟applications de simulation numérique en particulier pour les PME-PMI.

Cela ne paraît pas déraisonnable. De même qu’il n’est pas inutile de rappeler que le secteur des technologies de l’Information et de leurs usages a un impact considérable sur la croissance économique nationale, tout comme sur les emplois et la compétitivité.

Mesdames et Messieurs les candidats, bonne lecture donc, puisque ce Livre Blanc vous est destiné ! Quoi ? Vous voulez savoir où télécharger le document ? Hum… Il y a un petit problème, le site du SFIB est aux abonnés absents pour quelques jours. Gênant  non ? Comme quoi c’est bien vrai :  il ne faut jamais négliger l'importance des technologies de l’information.

mercredi 21 mars 2012

Les labos de R&D sont-ils « à roulettes » ?


Jean-Louis Beffa sur le CIR : "on ne demande pas
suffisamment de contreparties aux grands groupes"
Intéressant débat à fleuret moucheté lundi soir aux Entretiens de la Fabrique de l’Industrie. En cause le Crédit d’impôt recherche (CIR).

Invité de la soirée, Jean-Louis Beffa, ex pdg de Saint-Gobain,  ne cache pas sa désapprobation pour ce dispositif qui, dans sa nouvelle mouture, est passé de 2 à 4 milliards d’euros et dont l’assiette n’est désormais plus assise sur l’augmentation des dépenses de R&D.

Il a mis un peu d’eau dans son vin par rapport aux propos de son livre ( La France doit choisir ) et n’envisageait pas sa suppression. « Pour les PMI et les ETI, je n’y vois pas d’inconvénient » dit-il. En revanche il estime que le CIR est inadapté pour les grands groupes. « On ne leur demande pas suffisamment de contreparties. Pour eux, il faudrait que le financement soit dépendant de l’augmentation des dépenses en R&D et qu’il soit ciblé sur des programmes bien définis. »

Autre critique : « Le CIR n’a aucune composante de recherche coopérative et ne bénéficie pas à seule industrie, les services et les banques en profitant également. »

Il juge en outre que sur les 4 milliards d’euros de financement, il serait judicieux d’en accorder environ 700 millions à « des programme ambitieux ». On voit la logique qui l’avait conduit à promouvoir l’AII refaire surface.

Enfin, il résume son point vue avec un imagé « je ne crois pas que les laboratoires de R&D soient à roulettes », autrement dit il pense que les grands groupes ne peuvent pas si facilement délocaliser leur R&D et qu'il est donc inutile de les financer ainsi.

Démenti quasi immédiat de Patrick Pelata, le conseiller du président de Renault-Nissan, autre intervenant de cette soirée. « Nous avons besoin du CIR » dit-il. Et, l’air de rien souligne que Renault possède en Corée et en Roumanie d’importantes équipes de R&D et que dans le premier cas, les salaires sont la moitié des salaires français et le quart dans le cas de la Roumanie.

Autrement dit : « on peut délocaliser la R&D » affirme Patrick Pelata et il sous entend ainsi que sans le CIR, les délocalisations menées par Renault auraient peut être été plus nombreuses.

Ce débat sur le CIR n’est pas nouveau et n’est pas près de s’achever. Le financement de la R&D des grands groupes par le CIR se substitue-t-il à leurs investissements ou les fait-il croître ? Selon certaines études la réponse est complexe. Il semblerait en effet que l’effet d’aubaine joue dans un premier temps mais que le CIR serait, au bout de quelques années, à l’origine d’une réelle augmentation des dépenses de R&D. Une bonne raison alors pour ne rien changer et lui laisser le temps de produire ses effets.

Quant à savoir si la R&D peut filer à l'étranger, on constate en effet que la délocalisation est possible mais il faut tout de même en préciser les contours. Oui Renault délocalise une part de sa R&D, mais c’est essentiellement de l’ingénierie et du développement. Le cœur de sa R&D, sa recherche pure et dure, n’est pas près de filer hors de France. Avec ou sans roulettes.

Les autres articles sur les Entretiens de la Fabrique de l’Industrie
Chine : les entreprises occidentales ont mangé leur pain blanc 
Philippe Varin, Louis Gallois et Philippe Crouzet sur la Chine 
Fabrique de l'Industrie, suite...
Bon départ pour La Fabrique de l'Industrie
Lire aussi : la critique du livre de J-L Beffa par La Fabrique

mardi 20 mars 2012

« Alerte sur les IAA ! », le nouveau film catastrophe

"Hors boissons, les IAA françaises affichent un
déficit commercial qui va en s’aggravant"
Quelle est la première industrie française ? L’industrie agroalimentaire (IAA).  Elle constitue un domaine d’excellence de la France et affiche  un excédent commercial 12 milliards d’euros en 2011 alors que le déficit du commerce extérieur a atteint 70 milliards d’euros.

Pas de quoi pavoiser pourtant. Contrairement à ce que laissent penser ces chiffres flatteurs, en réalité (presque) tout va mal, comme le souligne Alexandre Mirlicourtois directeur des études de Xerfi (voir sa présentation vidéo de 5 minutes, résumée ici).

Attention  aux mauvaises nouvelles. Les voici :
-          Premier exportateur mondial au milieu des années 90, les IAA françaises sont désormais au 5è rang mondial derrière les USA, les Pays-Bas, l’Allemagne et le Brésil.
-          Les bons chiffres à l’export masquent une douloureuse réalité : ce qui fonctionne très bien sont les exportations de boissons (vins et spiritueux en particulier) qui continuent de croître.  En revanche tous les autres secteurs affichent un déficit qui ne fait s’aggraver depuis 2000.
-          La valeur ajoutée des IAA stagne à son plus bas niveaux depuis plusieurs années

Quelle est la raison de cette dramatique perte de compétitivité ? « Des marges trop faibles pour investir afin de rester compétitifs et de défendre ses positions sur les marchés tant intérieurs qu’extérieurs » affirme Mirlicourtois. Les marges sont en effet en chute libre depuis 2004 et bien en dessous de leur moyenne de long terme.

Les grands distributeurs sont pointés du doigt pour la pression qu’ils mettent sur leurs fournisseurs.  D’autant, souligne Mirlicourtois que, à l’opposé de leurs homologues allemands qui favorisent la distribution de leurs produits nationaux à l’étranger, les distributeurs français jouent la carte des produits locaux dans les pays où ils s’installent.

Cela dit la racine du problème est ailleurs. En cause : la trop petite taille des industries françaises. Près des trois quarts emploient moins de 20 salariés. Et même les plus grandes (Danone) font presque figure de nains face aux leaders mondiaux (Nestlé). Cela ne les met pas en mesure d’imposer leurs prix auprès des grands distributeurs. Résultat, leur seule solution est de baisser leur marge. Le cercle vicieux commence.

D’où la conclusion d’Alexandre Mirlicourtois : « L’accès à la taille critique doit rester l’objectif prioritaire pour les IAA », aussi bien pour s’imposer à l’international que pour faire le poids face aux clients de la grande distribution. Et donc défendre ses marges.

lundi 19 mars 2012

On est peut être plus compétitifs qu’on ne le pense…


"La France investit quatre fois
plus à l'étranger que l'Allemagne"
La France exporte de moins en moins. C’est ce que traduisent clairement les chiffres. Nous sommes donc de moins en moins compétitifs. Est-ce si sûr ?

Gabriel Colletis, économiste et professeur à l’université de Toulouse sème le doute : « « si on exporte moins, c’est peut être aussi tout simplement parce que les entreprises produisent moins en France et… davantage à l’étranger » dit-il.

Il ajoute : « Comparativement à l’Allemagne, la France investit, en valeur absolue, deux fois plus  à l’étranger. Et si l’on ramène cela à la taille respective de nos industries, c’est en valeur relative quatre fois plus que les Allemands ! » Autrement dit, les Allemands investissent principalement en Allemagne et les Français à l'étranger, ce que traduit bien l’évolution du nombre de voitures produites localement dans chacun des pays depuis une dizaine d'années.

Conclusion : méfions-nous des chiffres car « le constat de perte de compétitivité basé sur les chiffres de l’exportation  risque d’induire un ensemble de conclusions et de décisions politiques erronées pour  restaurer le compétitivité » 

Autre fait souligné par Gabriel Colletis à la l’occasion de la conférence donnée à l’école des hautes études en sciences sociale (EHESS) vendredi dernier, ceci, qui n’est pas un scoop mais mérite tout de même être rappelé : les entreprises du CAC 40 comptent 4 millions de salariés à l’étranger, 2 millions seulement en France ; et leurs investissements à l’étranger représente de 70 à 80% de leurs investissements totaux.

Bref, comme le soulignait l’économiste Robert Boyer, présent à cette conférence :  « à l’instar de ce qui se passe aux USA, il y a un réel divorce entre les grands groupes français et le territoire national.  Leur intérêt ne se confond plus avec l’intérêt du pays. »  Ce qui, évidemment n’est pas le cas pour l’Allemagne. Pas encore…?

vendredi 16 mars 2012

Quelles technologies clés pour demain ?


La biologie synthétique  en
deuxième position
Le Global Agenda Council on Emerging Technologies du World Economic Forum a identifié 10 technologies émergentes susceptibles d’avoir un impact majeur. Elles ne sont pas toutes celles qu’on s’attend à découvrir.

Les voici, classées par l'ordre d’importance donné par le WEF

1. Le traitement des « big data »
Autrement dit la capacité à exploiter et à extraire de l’information pertinente des formidables masses de données accumulées dans tous les domaines

2. La biologie synthétique et l’ingénierie métabolique
Ces technologies permettent de créer des organismes vivants « sur mesure » pour des applications industrielles (chimie, carburants…) ou la santé (médicaments)

3. La révolution verte 2.0
La capacité à produire davantage de ressources alimentaires, en minimisant l’impact environnemental et en réduisant les besoins en eau et énergie.

4. La conception des matériaux à l’échelle nanométrique
De façon à produire des matériaux aux propriétés parfaitement contrôlées conçus à l’échelle de la molécule.

5. La biologie systémique
La biologie systémique et les outils de simulation qui l’accompagnent permettent de mieux comprendre les interactions entre la chimie et la biologie. Essentiel pour la conception de nouveaux médicaments et la production via les biotechnologies

6. L’utilisation du CO2 comme ressource
Grâce à de nouveaux catalyseurs, faisant notamment  appel aux nanotechnologies, il commence à être possible d’obtenir des hydrocarbures et autres molécules à base de carbone, à partir de CO2.

7. La puissance électrique sans fil
Des technologies émergentes permettent la transmission de puissance électrique sans l’utilisation de connexions filaires. Impact majeur sur l’électronique grand public.

8. Systèmes à haute densité d’énergie
Des batteries plus performantes grâce à des technologies telles que les électrodes nanostructurées, l’électrolyse solide ainsi que des supercapacités de nouvelle génération.

9. La médecine personnalisée, la nutrition et la prévention des maladies
La génomique, la protéomique et la métabolomique promettent notamment des médicaments personnalisés. Jointes à des technologies telles que la biologie synthétique et les nanotechnologies, elles constituent une révolution dans le domaine de la santé

10. Des technologies avancées pour l’éducation
A partir de l’usage personnalisé des technologies de l’information et de l’utilisation d’Internet et des médias sociaux qui donnent accès à la formation à distance.

jeudi 15 mars 2012

François Bayrou : « Il n’y a pas de crise ! »


"Nous sommes entièrement responsables
de l'affaiblissement national"
François Bayrou était hier l’invité de l’Institut de l’entreprise, dirigé par le pdg de Vinci, Xavier Huillard, pour une conférence sur le thème « Produire en France : quelles solutions pour restaurer la prospérité ? »

Il n’est évidemment pas sorti de cette conférence de solution miracle pour restaurer la prospérité , si ce n’est, évidemment l’impératif de la  relance de la compétitivité des industries françaises. Et sur ce point, le candidat à l’élection présidentielle était très clair : « Quasiment tout le pacte social est financé par la production en France » a-t-il souligné pour justifier l’accent qu’il met sur le made in France.

Au passage il en a profité pour égratigner la proposition de « Buy European Act » du candidat Sarkozy. « Ce qui importe avant tout pour la France, c’est la production en France » dit-il en substance, avant de lâcher un provocateur : « Il n’y a pas de crise ! »

En réalité, dit-il, « la crise financière est derrière nous et nous sommes dans une situation d’affaiblissement national  dont nous sommes entièrement responsables. Il ne faut pas chercher à l’attribuer à telle ou telle cause extérieure. »

La solution pour en sortir passe donc par le développement des industries sur le territoire français et donc par une stratégie nationale en la matière. Pas à l’ancienne mode où l’état était l’initiateur de grands programmes mais, dit François Bayrou : « l’état a toutefois  encore un rôle de fédérateur et d’entraîneur à jouer en posant des jalons filière par filière. »

La candidat insiste en particulier sur la nécessaire solidarité des entreprises de toutes tailles à l’intérieur d’une même filière et préconise ainsi la création d’un « Commissariat général aux stratégies » qui aurait justement pour rôle de participer à la définition et d’encourager ces stratégies de filières.

Enfin, François Bayrou indique qu’il « ne souscrit pas à l’idée que c’est dans l’abaissement du coût du travail que ce trouve la solution » et cite évidemment l’exemple de l’Allemagne. Il reconnaît toutefois qu’il est nécessaire de mener une réflexion sur les charges des entreprises pour donner aux entreprises le « choc de compétitivité » qui leur est nécessaire.

mercredi 14 mars 2012

Dix mesures pour sauver le jeu vidéo français


Nicolas Gaume (SNJV) : "L'industrie
 du  jeu vidéo est stratégique"
Comme annoncé dans le précédent article sur l’industrie française du jeu vidéo , le Syndicat National du Jeu Vidéo (SNJV) a présenté hier à la presse ses « 10 mesures clés pour relever les défis industriels du jeu vidéo en France » qu’il entend désormais présenter aux candidats à l’élection présidentielle.

A cette occasion, Nicolas Gaume président du SNJV souligne que « le caractère stratégique de cette industrie n’est pas pris en compte dans la politique économique de la France » et insiste sur le fait que « le secteur du jeu vidéo en France est aujourd'hui dans un état critique, malgré ses formidables atouts  »


Regroupées selon cinq grands thèmes, les propositions du SNJV ont toutes un point commun : qu’il s’agisse de financement, d’aide à l’innovation ou de statut juridique, elles mettent en avant la grande spécificité du secteur – à la frontière des industries culturelles et numériques – qui impose, selon le SNJV, des mesures spécifiques.

« Nous n'avons notre place nulle part car pour les uns nous sommes trop liés numériques et pour les autres trop impliqués dans le culturel » plaide Nicolas Gaume qui ajoute que les organismes traditionnels tels que la Caisse des Dépôts « sont très mal équipés pour gérer les investissements immatériels. »

Les dix mesures proposées sont les suivantes :

I. Renforcer l’outil de production des entreprises françaises du jeu vidéo par un meilleur accès à l’investissement.
Mesure n° 1 : Création du fonds d’investissement dans les entreprises du jeu vidéo de l'ordre de 100 M€.
Mesure n° 2 : Faciliter l’accès au capital développement pour les entreprises du secteur.

II. Créer un écosystème efficace pour le financement de la production française de jeux vidéo.
Mesure n° 3 : Créer des sociétés de financement de la production de jeux vidéo (type Sofica).
Mesure n° 4 : Pérenniser le crédit d’impôt jeu vidéo et l’adapter aux évolutions de marchés.

III. Soutenir efficacement les innovations des entreprises françaises du jeu vidéo.
Mesure n° 5 : Transformer le crédit d’impôt recherche en crédit d’impôt innovations.
Mesure n° 6 : Renforcer et pérenniser le dispositif de la JEI et l’étendre à toutes les entreprises innovantes.

IV. Créer un écosystème réglementaire stable pour la production.
Mesure n° 7 : Créer un statut de l’entreprise de création.
Mesure n° 8 : Adapter la réglementation juridique aux spécificités de production.
Mesure n° 9 : Adapter le droit du travail aux cycles de production du secteur.

V. Relever les défis de la compétitivité des entreprises françaises à l’international.
Mesure n° 10 : Soutenir le développement du jeu vidéo français à l’international.


On notera toutefois qu'en ce qui concerne le statut spécifique réclamé par le SNJV, le récent rapport parlementaire de Patrice Martin-Lalande remis en décembre dernier au ministre de la culture, avait conclut qu'il n'était pas nécessaire de créer un cadre juridique spécifique pour cette activité.

A lire 
France, ton jeu vidéo fout le camp
Le rapport parlementaire de Patrice Martin-Lalande

mardi 13 mars 2012

G-B : Oui à la politique industrielle !

Tim Bradshaw : " Le marché
ne règle pas tout"
Le credo libéral s’effriterait-il ?  Tim Bradshaw, responsable entreprise et innovation du CBI, le principal lobby des entreprises britanniques, écrit dans un récent article : « Il est aujourd’hui clair que laissé à lui-même le marché ne fournit pas automatiquement une économie solide et équilibrée. » Diable !

Conclusion :
 « Il est temps d’abandonner nos préjugés contre la mise en place d’une politique industrielle en Grande-Bretagne. Il nous faut tirer les leçons du passé, s’intéresser à nouveau à la façon de mettre en œuvre une politique industrielle et en faire une partie intégrante de nos plans pour stimuler la croissance. L’approche mise en œuvre doit être pratique afin de pousser les entreprises à développer leur chaîne de valeur en G-B et pour réaliser des investissements pérennes afin de créer une base industrielle solide. Nous devons utiliser tous les instruments disponibles, aussi bien la fiscalité qu’une politique d’achat gouvernemental, pour développer notre industrie. »
Tim Bradshaw souligne en outre que :
«  Le développement d’une industrie compétitive impose de repenser radicalement le rôle stratégique du gouvernement et en particulier la façon dont il travaille avec les entreprises. D’autres pays prennent de l’avance et nous ne devons pas hésiter à prendre exemple sur les meilleurs d’entre eux. Il est temps de mettre en œuvre une politique nouvelle et pragmatique pour le XXIè siècle.»

Autant dire que le CBI, en la personne de Tim Bradshaw, n’a pas hésité pour saluer une mesure prise par le gouvernement quasi simultanément avec la publication de son article. Le gouvernement anglais vient en effet de s’engager à doubler en 2012 ses achats auprès de PME britanniques. Ils passeront ainsi de trois à six milliards de livres.

lundi 12 mars 2012

Déclarer l’urgence industrielle


Pour un changement de paradigme
Dans son livre « L'Urgence industrielle ! »  Gabriel Colletis, professeur à l'université de Toulouse, propose un « changement de paradigme » pour sortir de la crise via la relance de l’industrie car, écrit-il « si la crise actuelle est bien celle d’un capitalisme financiarisé, ce n’est pas une crise financière. Il s’agit  bien d’une crise globale, à la fois sociale, financière et, in fine, politique


Ainsi,  « les solutions à rechercher d’abord se trouvent non du côté de la finance mais du côté de l’économie réelle », et ajoute-t-il, « au cœur de ce changement de paradigme se trouve le triptyque industrie, progrès social et démocratie.»

Selon lui ce changement de vision  s’appuie sur sept principes :

Promouvoir une autre conception du travail. « On a dévié en ne l'envisageant que sous l'angle du coût salarial, alors que le sujet principal devrait être la reconnaissance des compétences professionnelles. »
Refonder la protection sociale. « Elle est aussi un système de protection économique. Garantir des revenus aux chômeurs, aux malades et aux retraités permet d'éviter la chute de la demande qui a été subie à la fin des années 1920, avec les conséquences que l'on sait. »
Remettre la finance au service du développement économique et social. « Il faut que la finance arrête de surplomber l'économie réelle et de lui dicter ses normes - comme la modération salariale - . De même que le smic a été créé dans les années 1960, il faudrait réintroduire une forme d'indexation des salaires basée, par exemple, sur la capacité d'innovation des entreprises. »
Réorienter la production économique  «  vers les besoins fondamentaux de la société, en réalité de moins en moins bien couverts : nutrition, santé, logement, équipement du logement économe en énergie. »
Reconnaître l'entreprise comme une entité juridique séparée de ses actionnaires.
Ancrer les activités dans les territoires. « On doit sortir de la simple localisation qui met en concurrence les implantations, pour passer à la logique d'accès à des compétences. »
Mettre en place des protections. Par exemple « des droits de douane à l'échelle européenne sur des critères sociaux et environnementaux . »


S'y ajoute un huitième impératif :  Démocratiser le  fonctionnement des entreprises.

Ce changement de paradigme est pour Gabriel Colletis, « un processus à inscrire dans le temps long et non un changement qui s’apparenterait à un « grand soir ». [Cela] ne signifie pas qu’il n’y ait rien à faire de façon immédiate. Tout au contraire. Il faut déclarer sans tarder l’urgence industrielle et commencer à réfléchir aux moyens de la mettre en œuvre de façon effective. »

vendredi 9 mars 2012

Réindustrialisation : le point de vue de la CFDT métallurgie


Dominique Gillier, secrétaire général de
la fédération métallurgie de la CFDT
« Nous ne sommes pas hostiles au principe du ‘choc de compétitivité’ prôné par certains » dit Dominique Gillier, secrétaire général de la fédération métallurgie de le CFDT (FGMM-CFDT). « Choc de compétitivité », c'est-à-dire le transfert d’une partie des charges sociales de l’entreprise vers la collectivité pour restaurer les marges des entreprises. « Notre système de financement de la protection sociale pénalise les entreprises » reconnait-il lors de l'interview pour ce blog.

En revanche, Dominique Gillier est clairement opposé au transfert vers la TVA « sociale ». Une augmentation de la CSG lui semble préférable car appuyée sur  une assiette plus large .  A deux conditions toutefois :
- que les revenus nets des salariés ne soient pas amputés.
- Que l’on s’assure que les sommes correspondantes soient effectivement affectées à l’investissement.

Pour cette dernière raison, la FGMM-CFDT ne souhaite pas la fusion de la CSG et de l’impôt sur le revenu de façon à pouvoir à contrôler l’usage du surcroît de CSG.

Autre credo de la CFDT métallurgie : « il est nécessaire de mettre en place une politique industrielle » mais « pas sous les formes d’antan comme ce fut le cas avec le Commissariat au plan et la politique de commandes publiques ».

Dominique Gillier met en outre l’accent sur huit points clés qui lui paraissent fondamentaux :

1. La politique énergétique : « nous ne sommes pas opposés au nucléaire, mais il faut parallèlement développer les énergie renouvelables »
2. L’évolution vers une économie bas carbone : avec le développement des technologies et des activités d’éco conception jusqu’au recyclage.
3. L’écofiscalité : faire payer les pays qui ne jouent pas les même règles du jeu en matière de politique environnementale
4. Le développement des PME : notamment par une mutualisation de leurs moyens
5. La recherche technologique et la diffusion de l’innovation : « le CIR est une bonne initiative mais doit profiter davantage aux PME ». Dominique Giller souligne aussi le rôle important des centres techniques
6. Le renouvellement et la transmission  de savoir-faire : notamment en faisant monter le niveau de qualification et en donnant à l’industrie davantage d’attractivité
7. Le dialogue social
8. La prise en compte de l’investissement à long terme : notamment en orientant davantage l’épargne vers l’industrie.

Enfin, Dominique Gillier souligne que « retrouver de la compétitivité est indispensable pour beaucoup d’activités exportatrices, principalement industrielles ». Mais, ajoute-t-il,  « cela doit s’inscrire dans un pacte national et social de réindustrialisation, qui donne un sens à la compétitivité. Un pacte à négocier, qui impliquerait aussi l’Etat, avec une politique industrielle axée sur la montée en gamme et la croissance verte de la production française.» 


Lire aussi
Réindustrialisation : le point de vue de FO
Le 'Point de vue' de Dominique Gillier sur le site de La Fabrique de l'industrie

jeudi 8 mars 2012

Arcelor Mittal réouvre son aciérie et embauche… aux US


Sénateur Brown : "achetons de l'acier
américain"
C’est peut-être, indirectement, une bonne nouvelle pour le site français. Après plus de trois ans d’inactivité, l’aciérie ArcelorMittal de Cleveland (Ohio) s’apprête à redémarrer au printemps. Comme quoi une fermeture peut, parfois, ne pas être définitive. 

Dans le même temps, l’usine a commencé à embaucher 150 personnes. Cela dit,il n'y a pas de quoi pavoiser :  lors de sa mise en veille en mars 2009, le site qui employait jusqu’à 1440 salariés n’avait conservé que 250 personnes pour assurer la maintenance de l’usine et en avait reclassé 300. Et  cette suspension d’activité faisait suite à la fermeture par Arcelor Mittal de ses deux hauts fourneaux de Cleveland. 

L’usine de Cleveland n’a pas reçu la visite de Nicolas Sarkozy mais celle du sénateur de l’Ohio Sherrod Brown (démocrate). Il en a profité pour faire passer un message : «  le type d’emplois bien payés - comme ceux qui sont actuellement recrutés à Cleveland -  que fournit l’industrie manufacturière  ne pourra être conservé sans un renforcement du programme Buy America. » 

 Buy America préconise que les infrastructures de transport soient de préférence construites avec des produits locaux. Le sénateur Brown explique ainsi qu’un recours aux productions américaines pour ce qui concerne l’acier et le fer utilisés pour les systèmes de transport publics, les infrastructures, l’armée... soutient non seulement les producteurs d’aciers, mais également la création d’emplois manufacturiers dans tous les Etats-Unis.  

Le sénateur a également annoncé une série de mesures pour soutenir les producteurs d’aciers américains en réponse à la modification de la réglementation qui a depuis quelques années affaibli les prescriptions du programme Buy America.  

mercredi 7 mars 2012

« Les délocalisations motivées par les bas salaires, c’est fini ! » affirme le Pdg de GE

I'm back in the US !
En voilà une nouvelle ! Jeff Immelt, le pdg de General Electric  l’affirme clairement dans l’interview publiée dans le dernier numéro d’Harvard Business Review, déjà cité ici. Pour GE, c’est une chose entendue : « les délocalisations uniquement motivées par un bas coût du travail sont le modèle d’hier. »  

Ce qui, bien sûr, ne signifie pas que GE va arrêter de produire ailleurs qu’aux USA. « Nous devons trouver le lieu, quel qu’il soit,  où nous pouvons développer et produire […] au meilleur coût. » Mais  GE adopte désormais une approche beaucoup plus raisonnée de l’outsourcing qui, ce faisant, rend dans une certaine mesure les Etats-Unis concurrentiels en termes de production.

Jeff Immelt en donne pour preuve le renouveau du site de production de Louisville (Kentucky). Baptisé Appliance Park, ce site qui fabrique des produits électroménagers (frigidaires…) avait vu connu le déclin au profit des pays à bas coût de main d’œuvre. C’est désormais de renaissance qu’il est question.

GE a prévu d’investir 800 millions de dollars sur ce site. Il a déjà consacré quelque 40 millions au développement d’un centre informatique de top niveau. « Le rôle [que ce centre informatique] va jouer pour améliorer l’efficacité, la productivité et la qualité, est le symbole de la transformation d’Appliance Park où nous nous sommes attelés à reconcevoir toutes nos lignes de produits et la façon dont nous les produisons. » 

Jeffrey Immelt raconte que dès 2008 la délocalisation est apparue comme un modèle passé de mode pour les produits de GE Appliances et, qu’après avoir pensé se débarrasser de cette activité, il en est venu à la conclusion qu’il était possible de gagner face à la compétition à condition de prendre les bonnes décisions. « La question était "où investir et comment". Aujourd’hui dans beaucoup de métiers, vous ne pouvez plus vous battre uniquement sur les coûts et vous demander seulement "où est le marché ? quelle est notre proposition de valeur ?" »

Trois solutions ont conduit au renouveau d’Appliance Park.  Primo : l’innovation avec le recrutement de 300 ingénieurs, designers et autres emplois de haut niveau. Secundo : le lean manufacturing, autrement dit la remise à plat des process de production. Tertio : l’investissement humain avec un « nouveau modèle des relations de travail ».

Résultat de cette nouvelle approche : « En 2009, GE a annoncé qu’il produirait un chauffe eau hybride à Appliance Park – la première nouvelle ligne de produits fabriquée à Louisville depuis 50 ans. Six mois plus tard, nous avons annoncé une nouvelle machine à laver et un nouveau sécheur. En octobre 2010 nous avons décidé de créer quatre centres d’excellence aux Etats-Unis pour la conception et la fabrication de réfrigérateurs. »

Conclusion :  « [Cela] montre que lorsque nous investissons dans les compétences de nos salariés, dans les technologies et dans de nouveaux business models, nous pouvons rapatrier la production aux Etats-Unis tout en étant profitables. » Et, ajoute le patron de GE  : « quand nous décidons du lieu d’implantation d’un site de production nous nous posons cette question : ‘Est-ce que nos salariés américains et notre technologie nous offrent un avantage concurrentiel ?’ Et de plus en plus souvent, la réponse est oui. »

Lire aussi
« Les US doivent consacrer un milliard de dollars par an à la R&D sur le manufacturing »
Finalement, qu’est ce qu’un pays « compétitif » ?

mardi 6 mars 2012

« Les US doivent consacrer un milliard de dollars par an à la R&D sur le manufacturing »

Quand la production s'en va,
 l'innovation s'en va aussi
Un milliard de dollars par an pour la R&D consacrée au manufacturing ! Qui veut cela ? Deux professeurs à Harvard Business School, Gary Pisano et William Shih. Ils l’écrivent dans la mine d’information que constitue le dernier numéro de Harvard Business Review, Reinventing America, consacré en bonne partie à la problématique de réindustrialisation du pays.

Les auteurs commencent par montrer l’effet pervers des délocalisations de la production qui a souvent pour effet d’éroder sérieusement les capacités d’innovation du pays. Souvent, pas toujours. Ils expliquent que dans certains cas – quand la production est modulaire, quand les processus sont matures – la délocalisation est possible sans trop de danger. Mais ils insistent en revanche sur les risques majeurs pour la compétitivité du pays que, hors de ces cas de figure, la délocalisation engendre car, alors, elle est liée à l'innovation.

Ils en concluent que conserver et relancer la production manufacturière aux US est crucial. D’autant que les technologies de production sont plus difficiles à copier que l’innovation produit. Et que, surtout, « le savoir faire en production est long à acquérir et très facile à détruire. »

Conclusion : le gouvernement doit faire quelque chose. Non pas en favorisant tel ou tel type d’industrie mais en soutenant l’innovation et en particulier celle qui à trait à la production.

La R&D en production financée par le gouvernement a eu par le passé des effets positifs sur l’industrie, soulignent-ils, citant en exemple les recherches menées en métallurgie et leurs retombées sur l’aéronautique. Mais, disent-il « depuis des décennies, ce type de R&D s’est asséché »

La solution selon eux  : faire ce que préconise le Council of Advisors on Science and Technology du président : « consacrer 500 millions de dollars par an à une grande initiative concernant les moyens de production avancés. » Et ils vont même plus loin en préconisant de porter cette somme à un milliard de dollars, somme finalement « modeste » eu égard au budget gouvernemental annuel de R&D de 143 milliards de dollars. « Sans cela, une renaissance de la production américaine est illusoire » écrivent-ils.

Dans ce contexte, il est intéressant de noter que, comme on l’écrivait ici hier, en Grande-Bretagne, le premier institut de transfert de technologie à avoir été lancé est précisément celui concernant le High Value Manufacturing, avec un budget annuel de 140 M£.

Les auteurs concluent leur article avec un avertissement :  « Les US ont mené depuis plusieurs décennies une expérimentation en vraie grandeur pour tester l’hypothèse qu’ils peuvent être performants avec une économie post-industrielle. Les patrons et le gouvernement doivent mettre fin à cette expérience avant qu’il ne soit trop tard. »

lundi 5 mars 2012

Réindustrialisation : une autre source d’infos

Vous pouvez naturellement continuer à lire chaque jour ce blog. Mais si vous êtes vraiment concernés par la problématique de l’industrialisation une autre source d’information est désormais disponible : le think tank de Louis Gallois, la Fabrique de l’Industrie, à en effet ouvert aujourd’hui son site www.la-fabrique.fr qui offre une vaste palette d’informations. Bienvenue à lui.

Transfert : France et G-B, même combat !


En anglais: Catapult. En français : SATT
Vous avez certainement déjà entendu cela : « Nous avons un savoir faire scientifique de haut niveau qui se situe au second rang mondial derrière les Etats-Unis. C’est une formidable source d’avantage compétitif. Mais nous ne savons pas traduire cette avance scientifique en réussites industrielles. » Bref, nous sommes vraiment médiocres en matière de transfert de technologies

Seule originalité de ce constat répété à l’envi en France depuis des décennies, il est le fait du Dr Herman Hauser, un entrepreneur autrichien qui a fait carrière en G-B. Et c'est ce qu’il écrivait à propos de… la Grande-Bretagne dans un rapport de 2010 destiné aux autorités britanniques : « The Current and Future Role of Technology and Innovation Centres in the UK ». 

Amusant, non ? D’autant que comme ses homologues français il prenait, comme exemple l’efficacité de l’Allemagne en matière de transfert de technologie, les incontournables Fraunhofer Institutes.

Le constat a fini par donner naissance, côté français, aux SATT, société d’accélération de transfert de technologie. Les cinq premières, dotées de 300 millions d’euros, ont été sélectionnées en 2011.

Mêmes causes mêmes effets. En G-B, l’équivalent des SATT a vu le jour en 2011 également : ces sociétés de transfert de technologies, censées combler le fossé entre recherche et industrie s’appellent Catapult. Il est donc là aussi question d’accélération…

Ce programme de plus 200 millions de livres vise dans un premier temps à créer cinq Catapults. La première lancée en octobre 2011 est déjà en fonctionnement. Elle est dédiée à la fabrication avancée (High value manufacturing) et dotée de 140 millions de livres. Suivront les quatre autres :

- Une pour l’énergie renouvelable offshore. Lancée en février derneir elle est dotée de 50 M£ et ouvrira cet été en Ecosse.
- Une pour la thérapie cellulaire, prévue pour l’été 2012 et dotée de 50 M£
- Une pour les applications spatiales (automne 2012)
- Une pour l’économie numérique connectée (automne 2012)

A terme, quatre autres Catapults seront mises en œuvre parmi les thèmes suivants :
- Systèmes complexes
- Villes du futur
- Internet du futur
- Photonique
- Utilisation efficace des ressources
- Systèmes de capteurs
- Smart grids
- Systèmes de transport et intégration

Si avec tout cela on ne parvient pas à accélérer le transfert de technologie, de l'un et l'autre côté de la Manche, c'est vraiment à désespérer.

vendredi 2 mars 2012

France : ton industrie du jeu vidéo fout le camp !


En France, il n'y a pas que le fromage et la mode !
En l’espace de quelques années, le nombre de développeurs de jeux vidéo est passé au Canada de 500 à 15000.  Dans le même temps la France a vu leur nombre divisé par deux, passant de 10000 à 5000. Et bon nombre d’entre eux sont partis... au Canada. C’est de la délocalisation ou je ne m’y connais pas.

Cause de cette hémorragie de talents, la politique agressive menée d’abord par le Québec, puis le Canada anglais, pour attirer les entreprises. Des aides à la production qui  atteignent jusqu’à 50% des coûts de développement. Résultat, une entreprise comme Ubisoft, le principal acteur français du jeu vidéo compte ainsi plus de 5000 personnes au Québec et seulement 1200 en France.

Désormais, d’autres pays, à grand renfort de subventions, tentent également d’attirer sur leur sol les entreprises françaises. Parmi eux,  les Etats-Unis, la Corée, la Chine et même Abu Dhabi …

Cette féroce compétition s’explique par le formidable potentiel de cette industrie, souvent sous estimée. Elle réalise un chiffre d’affaires mondial de 52 milliards d’euros (2,7 milliards d’euros en France)  qui croit régulièrement au rythme de 10% l’an. En 2014 le chiffre d’affaires devrait dépasser largement celui de l’industrie cinématographique pour atteindre 90 milliards d’euros !

Forte d’un savoir faire reconnu, la France y figure en extrêmement bonne position. Ses entreprises, réunies pour la plupart au sein du syndicat national du jeu vidéo* (SNJV), investissent chaque année quelque 400 millions d’euros sur le sol français dans la production de jeux de tous types : jeux pour consoles, pour téléphone mobile, pour Internet etc. Elles exportent 70% de leur production.

Pour soutenir cette industrie, Frédéric Lefebvre, ministre du commerce extérieur, a annoncé ce matin une première mesure : un vaste programme destiné à aider et à soutenir la filière à l’exportation. C’est une initiative appréciée par Nicolas Gaume, président du SNJV. Elle s’accompagne de la création d’une marque « Le Game » (photo) destinée à mette en lumière et à valoriser le jeu vidéo made in France.

Il est certainement temps de prendre vraiment au sérieux cette industrie. Mais avant cela il est urgent de résoudre un imbroglio européen.  La France a crée en 2008 un crédit d’impôt spécifique (20% des coûts de développement)  pour soutenir la production de jeux dans l’hexagone. Le dispositif est arrivé à expiration fin 2011. Et il se trouve que Bruxelles, au nom de la concurrence, se fait tirer l’oreille pour accepter sa reconduction. Un comble !

« Nous sommes confiants, note toutefois Nicolas Gaume, car les autres pays européens, en particulier le Royaume-Uni et l’Allemagne, nous soutiennent. » Le premier, qui excelle dans les jeux pour console, et le second, bien placé sur les jeux en ligne, ont en effet la volonté d’instaurer à leur tour une aide de ce type à leur industrie.

Reste que, comme le prouvent les délocalisations d’entreprises, cette mesure, nécessaire, ne semble pas suffisante. Le crédit d’impôt a permis de soutenir, entre 2008 et 2011, 100 projets pour 32 millions d’euros, mais n’a pas stoppé l’exode des cerveaux.

Y-a-t'il quelque chose à  faire ? On en aura peut être une meilleure idée le 13 mars prochain. Le SNJV se propose en effet d’organiser une conférence de presse au cours de laquelle il exposera ses idées en la matière. Je vous tiendrai au courant.

*A l’exception évidemment de Vivendi. Il est le leader mondial des éditeurs indépendants mais le doit au rachat d’Activision et Blizzard, entreprises américaines installées aux États-Unis

jeudi 1 mars 2012

Finalement, qu’est ce qu’un pays « compétitif » ?

Baisse de salaire ne rime pas
avec compétitivité
Bonne question. Merci de me l’avoir posée. D’autant que j’ai trouvé dans le dernier numéro d’Harvard Business Review (mars 2012) une définition qui me paraît  fort pertinente. La voici :
« Les Etats-Unis sont un pays compétitif dans la mesure où les entreprises installées aux US sont capables d’affronter avec succès la compétition mondiale tout en assumant les standards, actuels et croissants, de niveau de vie de l’américain moyen. »
Le fameux Michaël Porter et Jan Rivkin, (aidés de Richard Vietor et Matthew Weinzierl) se sont décarcassés pour donner cette définition précise. Elle signifie pour eux qu’un site, un pays, compétitif « est générateur de prospérité à la fois pour les entreprises et les citoyens. »

Conséquence : « Des salaires en baisse, pas plus qu’un dollar plus faible, ne peuvent être considérés comme une amélioration de la compétitivité américaine. » De même, « l’augmentation à court terme  de la compétitivité obtenue en licenciant des travailleurs n’est pas un signe de compétitivité du pays, mais une preuve de faiblesse. »

Autrement dit, pour les auteurs, la compétitivité se construit sur le long terme c'est-à-dire en augmentant la valeur des biens et services produits par unité de capital, de travail et de ressources. Et : « l’augmentation de compétitivité à long terme devrait être l’objet principal d’une politique économique. Cela demande un environnement économique propre à supporter l’innovation permanente en termes de produits, de process et de management. »

Enfin, les auteurs soulignent que la compétitivité n’a rien à voir avec l’emploi.
« Des mesures politiques peuvent stimuler l’emploi à court terme en stimulant artificiellement la demande dans des industries à fort contenu de main d’oeuvre et non exposées à la concurrence internationale, comme le bâtiment. Toutefois il n’en résulte pas un emploi durable propre à augmenter le niveau de vie d’un pays. » 
Il en va exactement de même des efforts des gouvernements pour stimuler la demande.

Bref, avec cette définition, les doxa de droite comme de gauche en prennent un sérieux coup…