jeudi 16 février 2012

Chine : les entreprises occidentales ont mangé leur pain blanc


Après le made in China,
le made by China
Hier les pdg de PSA, EADS et Vallourec réunis pour la conférence organisée par La Fabrique de l’industrie nous parlaient ici des bénéfices que retirent leurs entreprises d’une implantation en Chine. Bien. Mais avec la montée des exigences chinoises, tout indique qu’elles ont mangé leur pain blanc.

« La Chine est devenue le premier marché pour nos avions. Mais à la fin de la décennie, elle sera une concurrente directe » affirmait ainsi Louis Gallois. Idem pour les hélicoptères : « Depuis la fin des années 1970, Eurocopter développe des hélicoptères en Chine. Celui que nous développons aujourd’hui avec l’entreprise Avicopter est déjà à moitié chinois. Le prochain le sera intégralement. » 

Louis Gallois ajoute : «  Hier nous ne transférions pas de technologie, mais essentiellement des savoir-faire en production – ordonnancement, qualité, gestion de la supply chain… Désormais nos partenaires chinois lient directement les ventes au transfert de technologie et étendent leur demande au marketing. » 

Les deux autres pdg présents à cette conférence ne disent pas autre chose. « Le marché automobile chinois est aujourd’hui détenu à 70% par des marques étrangères en joint venture 50/50 avec des entreprises chinoises. Le plan quinquennal chinois vise clairement à créer des marques purement chinoises » indique Philippe Varin pdg de PSA Peugeot Citroën.

Et Philippe Crouzet, pdg de Vallourec souligne : « Il va devenir de plus en plus difficile, dans le domaine de l’acier de lutter contre les entreprises à capitaux d’état qui vont systématiquement privilégier les entreprises locales pour leur approvisionnement. »

Bref, les bénéfices que les entreprises occidentales ont trouvés à s’implanter en Chine s’amenuisent. Le nouveau plan quinquennal 2011-2016  a mis fin aux joint ventures 50/50 au profit de JV à majorité chinoises. Et, dans tous les domaines, les chinois ne se contentent plus de l’initiation au management occidental qu’ils trouvaient dans les JV. Ils exigent désormais de réels transferts de technologie pour bâtir une industrie propre.

Que faire dans ces conditions pour n’être pas dévoré tout cru ? Réponse unanime : « il faut conserver un coup d’avance technologique ». Facile à dire… Philippe Varin se fait plus précis : « Pour conserver l’avantage technologique, deux choses sont nécessaires. La première est d’être mondial. La seconde est de conserver des usines en France. Penser que l’on peut faire avancer la technologie sans usines est une vue de l’esprit. »

Philippe Crouzet, indique pour sa part : « Dans nos métiers, les technologies ne sont pas brevetables, il s’agit davantage d’un savoir-faire. C’est ce qui nous protège. Et nous avons été très prudents. En Chine, nous n’avons que des entreprises que nous contrôlons à 100%, ce qui, dans notre secteur, était encore possible il y a quelques années. »

Les entreprises occidentales ont une autre carte à jouer : leur marque. « Les autorités voudraient bien voir les voitures chinoises prendre à terme la majorité du marché. Mais acquérir les technologies est une chose. Convaincre les consommateurs d’acheter chinois en est une autre; les consommateurs chinois privilégient en effet la marque et la qualité » dit Philippe Varin. D’où d’ailleurs sa volonté de s’étendre dans le haut de gamme de façon à renforcer encore l’image du groupe PSA. C’est le sens de l’implantation à Shenzhen de l’usine qui produira la DS 5.

Philippe Crouzet abonde : « En ce qui concerne les tubes d’acier, les produits issus de la fusion de Mannesmann avec Vallourec sont la référence. Ils ont fait la preuve de leur efficacité dans des applications très critiques depuis des lustres. Il sera difficile pour des nouveaux venus de les concurrencer.»

Un autre atout des entreprises occidentales est leur réseau. « Dans le domaine de l’aéronautique il faut 20 à 30 ans pour bâtir un réseau efficace de service après vente » dit Louis Gallois. Mais là encore la pression est forte. Et le constructeur canadien Bombardier qui a déjà signé un accord stratégique avec le chinois Comac, pourrait bien lui offrir certaines opportunités en la matière afin de se développer sur ce marché.

Il est enfin une autre carte que les occidentaux rêvent de pouvoir jouer : celle de l’augmentation des salaires chinois qui à terme pourrait réduire leur avantage concurrentiel. « A Shenzhen, les salaires croissent déjà de 20 à 30% par an » constate Philippe Varin.

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